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Rubrique : actualités / Branche : droit des marques et des dessins & modèles / Domaine : noms de domaine et référencement
Citation : Juriscom.net, Nathalie Dreyfus (entrevue) , Cybersquatting : l'anonymisation des ''whois'' au cœur des préoccupations pour 2008 , Juriscom.net, 17/01/2008
 
 
Cybersquatting : l'anonymisation des ''whois'' au cœur des préoccupations pour 2008

Juriscom.net, Nathalie Dreyfus (entrevue)

édité sur le site Juriscom.net le 17/01/2008
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 Entrevue avec Nathalie Dreyfus (www.dreyfus.fr), Conseil en propriété industrielle (*)

 

En enregistrant le nom de domaine du site d’un particulier, Blogartdeco.fr, l’AFNIC annonçait en fanfare, vendredi 11 janvier 2008, son millionième « .fr Â». Cette réjouissance est-elle ternie, pour les titulaires de marques, par l’anonymisation des particuliers dans les « whois Â»* ? Pour répondre à cette question, Juriscom.net a choisi d’interroger un expert du secteur, Nathalie Dreyfus, Conseil en Propriété Industrielle.

 

Quelle est l’importance des litiges relatifs à une infraction en droit des marques constatées en matière de noms de domaine en « .fr Â» ?

 

Le nombre de plaintes relatives au cybersquattage de noms de domaine en .fr déposées auprès du centre d’arbitrage et de médiation de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI) a quasiment triplé en 2007 par rapport à 2006. 50 litiges, concernant 62 noms de domaine en .fr, ont ainsi été présentés devant le centre d’arbitrage durant l’année 2007, contre 18 en 2006.

 

Combien de litiges concernent les particuliers ?

 

60% de litiges concernent des personnes physiques en 2007. En 2006, seulement 26% des litiges impliquaient des particuliers, mais l’ouverture du .fr aux particuliers n’existe que depuis le 20 juin 2006.

 

Quelles sont les conséquences de l’anonymisation du whois de l’AFNIC en matière de protection des titulaires de droit sur une marque ?

 

L’enregistrement des noms de domaine en .fr des particuliers relève d’un principe de protection des données personnelles. Cette règle a été instituée par l’AFNIC pour répondre aux dispositions de la loi Informatique et libertés ainsi qu’aux exigences de la Commission nationale informatique et libertés (CNIL). Elle protège ainsi les données de leurs titulaires et des contacts administratifs associés à des personnes physiques. Dès lors, l’AFNIC ne peut pas communiquer à des tiers l’identité du titulaire d’un nom de domaine, quand bien même celui-ci contreferait une marque.

 

L’obtention de ces informations n’est certes pas impossible. Mais elle est complexe à mettre en œuvre. Il faudrait obtenir une ordonnance de référé, une ordonnance sur requête ou ouvrir une procédure extra judiciaire auprès du centre d’arbitrage et de médiation de l’OMPI. Chacune de ces procédures emporte son lot de difficultés et oblige à engager des frais.

 

On peut comprendre l’anonymisation dans la mesure où elle est destinée à protéger les données personnelles. Mais devant une atteinte manifeste à un droit, il faut pouvoir recourir à des procédures plus légères pour protéger les titulaires de marques. La question est la même pour sauvegarder d’autres intérêts. Je pense notamment à la protection des mineurs.

 

La France présente-t-elle une situation exceptionnelle en Europe, dans le monde ?

 

La tendance générale est sur l’anonymat. Elle est une conséquence, en Europe, de la Directive du 24 octobre 1995 sur la protection des données à caractère personnelle. La France enregistrait un certain retard pour l’anonymisation du whois, notamment par rapport à l’Angleterre et l’Italie. En revanche, les procédures de levée d’anonymat sont plus lourdes dans l’hexagone.

 

De son côté, l’ICANN, qui gère les domaines de « niveau supérieur », à savoir les .com, .org, .net … réfléchit depuis quelques temps à permettre aux personnes physiques de ne pas inscrire leurs données personnelles. Mais aucune vérification de l’exactitude des informations délivrées n’est effectuée à ce niveau. Par  exemple, sur les .com, la personne souhaitant enregistrer un nom de domaine peut délivrer n’importe quelle information. Or, l’anonymisation n’a de sens que si les données figurant dans les bases whois sont fiables. Il n’y aurait aucun intérêt, dans le cas contraire, à anonymiser.

 

Quelles sont les modifications récentes de la charte de l’AFNIC ? Qu’est-ce que cela va changer ?

 

L'AFNIC a très récemment mis en œuvre une solution permettant de lever l'anonymat. Depuis décembre 2007, il est possible de demander directement auprès de l'AFNIC la divulgation de l'identité et des coordonnées déclarées par un particulier ayant enregistré un .fr. Ces demandes doivent toutefois être formée par des ayants droit et présentées dans un formulaire spécifique qui est examiné par l’organisme.

 

Quelles seraient les solutions à venir ? Quel est le juste équilibre entre protection des données personnelles et protection du droit des tiers ?

 

La solution idéale, pour la protection des droits des tiers, est celle dans laquelle les données disponibles sur le whois sont vérifiées et accessibles à tous. En matière de marques, par exemple, les données personnelles des déposants sont accessibles à tous sur le bulletin de marques.

 

Le bon compromis, c’est de maintenir l’anonymat mais d’offrir aux ayants droit des processus de levée d’anonymat efficace, rapide et peu onéreux.

 

* Nathalie Dreyfus est Directrice du cabinet de Propriété Industrielle Dreyfus & associés, Conseil Européen en marques, expert du Centre d’Arbitrage et de Médiation de l’OMPI, du National Administration Forum, du Centre belge d’Arbitrage et de Médiation (CEPINA), de l’Asian Domain Name Dispute Resolution Center (ASNDRC) et de la Cour d’arbitrage Tchèque.

Propos recueilli par Lionel Thoumyre pour Juriscom.net


* Les whois permettent de retrouver dans les bases de données des gestionnaires de noms de domaine les noms et coordonnées du titulaire et du contact administratif d’un nom de domaine. 

 

 

 

 

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