Le célèbre syndicat américain qui représente les intérêts des majors de l’industrie du disque, la RIAA, a lancé, le 17 février, de nouvelles poursuites contre 531 internautes soupçonnés d’utiliser les réseaux d’échange de fichiers peer-to-peer (P2P) en violation des droits de propriété intellectuelle.
Il s’agit là de la 3ème salve d’offensives menée par la RIAA contre les internautes américains. Après 382 internautes poursuivis, puis 532 plaintes contre X (voir Sandrine Rouja, 532 plaintes contre X : la lutte contre les cyberpirates s’intensifie aux Etats-Unis, Juriscom.net, 28 janvier 2004), la RIAA s’attaque maintenant à 531 nouveaux cyberpirates présumés.
L’action de l’industrie du disque contre le P2P ne se borne pas à la poursuite des internautes utilisant les logiciels d’échange. Elle met aussi en cause les éditeurs du logiciel eux-mêmes, les accusant de fournir les moyens de procéder à des téléchargements illégaux. Le 6 février 2004, des perquisitions ont été menées jusqu’au domicile des dirigeants australiens de Sharman Networks, propriétaire de Kazaa ! Et pourtant, en avril 2003, un juge fédéral avait décidé que les éditeurs des technologies d’échange de fichiers n’étaient pas responsables de l’utilisation illégale faite par les internautes. Plus récemment, le 19 décembre dernier aux Pays-Bas, la Cour suprême tirait les mêmes conclusions concernant Kazaa.
Les poursuites de l’industrie du disque ont fait naître plusieurs contre-offensives.
Sharman Networks a porté plainte à son tour contre la RIAA. Les éditeurs de Kazaa accusent l’industrie du disque d’avoir violé la vie privée des utilisateurs du logiciel ainsi que d’avoir violé sa propriété intellectuelle. En effet, Kazaa a été utilisé pour intimider les internautes et lancer des appels plus ou moins virulents contre le téléchargement illégal de fichiers musicaux. Cette plainte vient d’être déclarée recevable par un juge fédéral, le 24 janvier.
D’autre part, la procédure mise en œuvre par la RIAA pour porter plainte contre les 531 internautes a suscité diverses critiques. Suite à l’affaire Verizon rendue en décembre 2003, la RIAA doit dorénavant passer par le juge avant de demander aux prestataires techniques la communication des coordonnées des présumés cyberpirates. Ce qui a conduit la RIAA à porter plainte contre X. Or, plutôt que d’établir individuellement les 531 plaintes auprès des tribunaux correspondants, la RIAA a mis en œuvre 5 procédures globales auprès d’un nombre très limité de cours américaines (Philadelphie, Atlanta, Orlando, et Trenton, New Jersey). L’association américaine de défense des droits numériques, l'Electronic Frontier Foundation, a dressé la liste des internautes mis en cause et permet à ceux-ci de prendre connaissance des données les concernant (adresse IP, chansons téléchargées, etc.).
Par ailleurs, une américaine, Michele Scimeca, titulaire du compte Internet utilisé par sa fille de 13 ans et poursuivie par la RIAA via la procédure contre X, attaque elle aussi le groupement d’éditeurs de musique. Elle accuse ce dernier de rackets et d’extorsions de fond lorsqu’il propose des règlements financiers amiables avant même d’avoir prouvé quoi que ce soit devant le juge. Cette contre-offensive a mis un terme à de nouvelles tentatives de règlements amiables.
Et pendant que les batailles judiciaires se poursuivent, on annonce une embellie de la vente de musique en ligne (voir "La vente de musique en ligne en plein boom", [presence-pc.com] ou "US downloads beat CD sales" [news.bbc.co.uk]).
Sandrine Rouja
Secrétaire de rédaction de Juriscom.net