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Rubrique : actualités / Branche : droit des obligations ; preuve ; responsabilité / Domaine : droits d'auteur et droits voisins
Citation : Juriscom.net, Sabrina Brandner , Le charme de CeCILL à l'épreuve des adeptes de la licence GNU GPL , Juriscom.net, 12/07/2004
 
 
Le charme de CeCILL à l'épreuve des adeptes de la licence GNU GPL

Juriscom.net, Sabrina Brandner

édité sur le site Juriscom.net le 12/07/2004
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[Réponse de Mme Cateryne Ducreux et contre-réponse de l'auteur ci-dessous]

 

Alors que la question de la brevetabilité des logiciels fait débat, la licence française CeCILL pour logiciel libre met de l’huile sur le feu.

 

Rappelons qu’un logiciel libre est un logiciel dont l’auteur reconnaît à l’utilisateur :

- la liberté d'exécuter le programme, pour tous les usages (liberté 0) ;

- la liberté d'étudier le fonctionnement du programme et de l'adapter à ses besoins (liberté 1), l'accès au code source est donc une condition requise ;

- la liberté de redistribuer des copies (liberté 2) ;

- la liberté d'améliorer le programme et de publier les améliorations, pour en faire profiter toute la communauté (liberté 3). Ici encore, l'accès au code source est une condition requise (voir : Qu'est-ce qu'un logiciel libre ? [gnu.org]).

 

Des licences d’utilisations sont toujours associées à ce type de logiciels. La plus répandue est la licence GNU GPL. Elle a pour origine la volonté de son créateur, Richard Stallman, de trouver une alternative aux règles du droit d’auteur mais encore plus aux règles contractuelles. Notons ici qu’elle n’a pas encore été traduite en français malgré son association à la distribution de nombreux logiciels libres français.

 

Aussi la France et, plus particulièrement, le CEA, le CNRS et l’INRIA, se sont permis de traduire la licence [inria.fr - PDF] et comme « le libre » est de mise en l’espèce, se sont arrogés le droit de la modifier et de la distribuer.

 

D’une part, la licence de logiciel libre française, qui répond au doux nom de CeCILL, reprend « les principes de diffusion des logiciels libres » et, surtout, ceux de la licence GNU GPL.

 

L’article 5.3 de la licence autorise le licencié à transmettre et à communiquer le logiciel libre au public sur tout support et par tout moyen ainsi qu’à mettre sur le marché, à titre onéreux ou gratuit, un ou des exemplaires du logiciel libre par tout procédé et, bien sûr, à distribuer des copies du logiciel libre modifié ou non à des tiers (article 5.3) à des conditions quasi semblables à celles de la GNU GPL. Quasi semblables…

 

D’autre part, en effet, la licence stipule certaines règles que les rédacteurs ont  imaginées pour l’adapter au droit français. Ainsi, il est indiqué à l’article 2 que le contrat (sous-entendu la licence) a pour objet la concession au licencié d’une licence mondiale pour se conformer, comme l’indique le CEA, le CNRS et l’INRIA, à l’article L. 131-3 du Code de la propriété intellectuelle. Dans le même ordre d’idée l’article 4.2 stipule que « le contrat produira ses effets pendant toute la durée légale de protection des droits patrimoniaux portant sur le logiciel », et l’article 5 indique avec précision, toujours conformément au droit français, l’étendue des droits concédés. De plus, le droit au nom prévu par l’article L. 121-1 du Code de la propriété intellectuelle est également stipulé dans la licence, complétant ainsi le GNU GPL.  Enfin, contrairement à la GNU GPL, la CeCILL comporte des clauses de responsabilité et de garantie aux articles 8 et 9 rendant le licencié responsable et garant alors que la licence GNU GPL l’exonère totalement.

 

Mais la FSF France, bureau de la Free Software Fondation en France (Christophe Guillemin, « La première licence française de logiciel libre déplaît aux créateurs de la GNU GPL », ZDNet France, 8 juillet 2004) a marqué son mécontentement à l’égard de la licence CeCILL. Selon elle, la GNU GPL n’est pas illégale et une adaptation au droit français n’était pas nécessaire mais « absurde » car elle n’a pas de portée mondiale mais bel et bien française. Ce qui est vrai puisque, dans un communiqué de presse [inria.fr], le CEA, le CNRS et l'INRIA reconnaissent que la licence CeCILL a vocation « à être reprise, en particulier par les organismes de recherche français ».

 

Sabrina Brandner
Juriste NTIC
Collaboratrice Juriscom.net

 

NDLR : des informations complémentaires et des commentaires sur cette licence peuvent être trouvés sur le site www.cecill.info.

 

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Réponse de Mme Cateryne Ducreux

 

Votre article appelle de notre part les commentaires suivants.

 

S'agissant de votre phrase introductive, veuillez noter que CeCILL n'alimente en rien la polémique sur le brevet logiciel mais intervient dans un domaine distinct du débat. Le cas échéant une démonstration argumentée serait bienvenue.

Quant à la volonté initiale du créateur de la GNU-GPL, la démarche de M. Stallman était de "trouver une alternative" au système des logiciels propriétaires plutôt qu'aux règles du droit d'auteur ou aux règles contractuelles (une relecture de la  GNU GPL vous en persuadera).

 

Quant à votre affirmation suivant laquelle "Aussi la France et, plus particulièrement le CEA, le CNRS et l'INRIA, se sont permis de traduire la licence et comme le "libre" est de mise en l'espèce, se sont arrogé le droit de la modifier et de la distribuer" : au-delà du caractère péjoratif, cet extrait contient des inexactitudes à relever : CeCILL est née de façon autonome vis-à-vis de la GNU GPL et n'est en rien une traduction de celle-ci, contrairement à ce que vous pouvez laisser penser en insérant sous les termes "permis de traduire" un lien pointant vers le texte de CeCILL. CeCILL ne fait que s'inspirer des principes directeurs de la GNU GPL, elle n'en est nullement un ersatz. Vous pourrez aisément vous en convaincre en comparant les traductions françaises déjà existantes de la GNU GPL avec le texte de CeCILL.

Quant à votre interprétation de l'article "ZDNet", remarquez  qu'à aucun moment le CEA, le CNRS ou l'INRIA n'ont émis un point de vue sur la légalité  de la GNU GPL. Ils ont simplement précisé que certaines de ses stipulations posaient des problèmes d'interprétation et étaient difficilement compatibles avec  les exigences du droit français.
 
Enfin, quant à la portée prétendument française de CeCILL, affirmer que CeCILL a vocation à être reprise en particulier par le CEA, le CNRS et l'INRIA ne conforte pas votre conclusion un peu hâtive. En effet, cette énumération est purement illustrative et non exhaustive, des personnes physiques ou morales qui peuvent y recourir (d'où l'usage du "en particulier"). De même, la notion de licence mondiale implique que les droits concédés
par la licence valent pour tous les pays : cette caractéristique n'est absolument pas remise en cause, que ce soit par la nationalité des parties, la désignation du droit applicable, ou par la désignation de la juridiction compétente.

 

Nous appelons votre attention notamment sur les licences Q Public Licence (QPL) explicitement soumise au droit norvégien et plus récemment à la Common Public Licence utilisée par la communauté Eclipse qui fait référence au droit américain et plus précisément à la loi de l'Etat de New York.

 

Enfin, comme vous le savez en tant que juriste, le fait qu'un contrat se réfère à une loi nationale ne signifie nullement qu'il n'est valable que sur le territoire du  pays concerné. Du fait du principe d'autonomie de la volonté largement admis par le droit international, les contrats comportant un élément d'extranéité (du fait de la nationalité différente des parties, du lieu d'exécution des prestations ou de livraison des marchandises etc) peuvent contenir, lorsque les signataires en ont décidé ainsi, une clause de détermination de la loi applicable qui facilite leur interprétation et la résolution des éventuelles difficultés quant à leur formation et/ou leur exécution.

Nous espérons sincèrement que ces précisions apporteront un éclairage complémentaire à votre analyse.


Cordialement


Cateryne Ducreux au nom de CEA, du CNRS et de l'INRIA
Direction juridique et du contentieux (DJC)
Service central de la propriété industrielle et des accords (SCPIA)

 

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Réponse de l'auteur

 

En écrivant “Aussi la France et, plus particulièrement, le CEA, le CNRS et l’INRIA, se sont permis de traduire la licence et comme « le libre » est de mise en l’espèce, se sont arrogés le droit de la modifier et de la distribuer”, nous reconnaissons avoir utilisé de manière malencontreuse les expressions “se sont permis” et “se sont arrogés le droit”  alors même que notre intention était de souligner la volonté du CEA, du CNRS et de l’INRIA de mettre en place une licence pour logiciel libre adaptée aux exigences du droit français.

 

En effet, nous soulignons dans l'article que la licence CeCILL reprend certains principes de la licence GNU GPL mais aussi qu'elle est rédigée de telle façon qu'elle soit adaptée au droit français.

 

D'autre part, en rappelant en conclusion ce qu'a dit la FSF France, bureau de la Free Software Fondation en France, notre intention n'était pas d'adhérer à ce qu'elle a déclaré mais d'illustrer le débat qui existait au moment où l'article a été rédigé. Toutefois, nous admettons que le rappel de cette position en fin de développement était inadéquat. Aussi, nous espérons que nos lecteurs aient pu se faire leur propre opinion en visitant les pages web proposées.

 

Sabrina Brandner

 

 


 

 

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