Le Conseil de la concurrence vient de rejeter, le 9 novembre dernier, la saisine de la société VirginMega, laquelle remettait en cause les pratiques de la société Apple sur le fondement de l'abus de position dominante en raison de l'incompatibilité entre les baladeurs numériques iPod (fabriqués et commercialisés par Apple) et les sites de téléchargement de musique par l'internet tels que celui de VirginMega.
Pour le Conseil, le refus, opposé à VirginMega, d'accorder une licence sur son dispositif propriétaire permettant de restreindre l'usage des titres téléchargés (Digital Rights Management ou DRM) - FairPlay -, interdisant du même coup aux consommateurs qui téléchargent des titres musicaux sur la plate-forme VirginMega de les transférer directement sur les baladeurs numériques d'Apple - le iPod -, ne constitue pas, en l'état actuel des marchés, une exploitation abusive de la position dominante que pourrait occuper Apple sur le marché des baladeurs numériques à disque dur, le cas échéant sécurisés, ou sur le marché du téléchargement payant de la musique en ligne en France.
Autrement dit, le Conseil n'a pas souhaité considérer que l'accès au DRM FairPlay était indispensable à l'exercice de l'activité d'opérateur de musique en ligne, que certes il était une ressource importante mais pour autant le refus d'accès de la part d'un opérateur, dominant sur le marché connexe des baladeurs numériques sécurisés à disque dur, ne constituait pas un abus.
Le Conseil allant même jusqu'à noter que les baladeurs à disque dur ne représentent pas la majorité des ventes de baladeurs numériques. Ils sont et resteront longtemps dominés par les baladeurs flash, qui peuvent également intégrer le DRM de Microsoft (plusieurs modèles sécurisés sont déjà disponibles en France).
Voici une belle décision que l'on peut qualifier de décision d'opportunité !
Opportunité tout d’abord de rappeler que par "une appréciation réaliste" des marchés en cause liées aux technologies de l'information, où les innovations se succèdent et ne se ressemblent pas et ce à un rythme élevé – très élevé – qu'il est dangereux de déduire si rapidement des abus de position dominante sur des marchés émergeants et mouvants.
Opportunité ensuite de rappeler que les ajustements des marchés aux innovations ne révèlent pas nécessairement des atteintes au droit de la concurrence.
Enfin, opportunité de rappeler les dispositions de l'article L. 462-8 du Code de commerce pour rejeter la saisine, les faits invoqués n'étant pas appuyés sur des éléments suffisamment probants, mais que la porte reste ouverte ... « Un tel rejet ne fait pas obstacle à ce que les entreprises du secteur, dans le cas où elles feraient état d’éléments nouveaux provenant de l’observation ultérieure du marché, puissent saisir utilement le Conseil. »
Autrement dit VirginMedia a perdu une bataille mais n' a pas perdu la guerre, qui ne fait sans aucun doute que commencer ... et les artistes dans tout cela ?
Alexandre Menais
Co-administrateur de Juriscom.net