Rendu célèbre par les nombreux procès dont il a fait l’objet depuis l’affaire Estelle H., Valentin L. essuie une nouvelle condamnation pour avoir hébergé un site portant préjudice aux ayants droit du petit poussin noir dénommé Calimero. Dirigé par Monsieur G., le site en question affichait l’effigie du personnage de dessin animé sous le titre « La page française de Calimero » pour présenter un site sadomasochiste pouvant être joint à partir de l’adresse « www.calimero.org ». Saisi par la famille P., héritière du créateur de Calimero, et la société Rever, le Tribunal de grande instance de Paris devait se prononcer sur l’atteinte aux droits d’auteur attachés au tendre volatil ainsi que sur la contrefaçon de la marque « Calimero », concédée par licence d’utilisation exclusive à la société demanderesse. Mais l’action était également dirigée contre Valentin L., gestionnaire du service Altern.org, accusé d’avoir hébergé le site litigieux.
Sans contester la matérialité des actes qui lui étaient reprochés, Monsieur G. a soulevé l’exception de l’article L. 122-5-4° du Code de la propriété intellectuelle selon lequel l’auteur ne peut interdire la parodie, le pastiche et la caricature. Mais le tribunal constate que le nom et le personnage de Calimero sont « reproduits servilement sans ajout ou retrait, sans travestissement », or, la parodie suppose « un travail de démarquage, de travestissement ou de subversion de l’œuvre parodiée, travail que le public perçoit comme tel. » L’exception de parodie ne peut donc pas s’appliquer en l’espèce.
Les juges reprochent ensuite à Valentin L. d’avoir accepté d’héberger un site reproduisant, dans son adresse et son contenu, une marque renommée. Ils admettent qu’il ne peut reposer sur le prestataire « une présomption de connaissance du contenu des sites qu’il héberge », mais ils ajoutent que Valentin L. « ne pouvait pas ignorer le nom de domaine et l’adresse du site de Monsieur G. et donc que ce nom était exclusivement constitué de la reproduction servile d’une marque renommée… », pour engager finalement sa responsabilité sur le fondement de l’article 1382 du Code civil. La mise en œuvre de cette responsabilité semble avoir été renforcée par le maintien d’un lien hypertexte, sur le serveur Altern.org, entre l’ancienne adresse contrefaisante et la nouvelle adresse du site de Monsieur G.
Le tribunal refuse l’appel en garantie de Monsieur G. formé par Valentin L. dès lors qu’aucune clause contractuelle ne le prévoyait. Il condamne finalement l'auteur à 300 000 F de dommages-intérêts et l’hébergeur, in solidum avec l’auteur, au versement de 60 000 F.
Lionel Thoumyre
Dir. éditorial de Juriscom.net