COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
2ème chambre, le 6 décembre 2007
SAS TWD Industrie c/ EURL Google France et Sté Google Inc.
Mots clés : liens commerciaux - liens sponsorisés - Adwords - contrefaçon (oui) - concurrence déloyale (non) - parasitisme (non) - détournement de clientèle (non) - dénigrement (non) - publicité mensongère (non)
Extraits :
"(...) Attendu que la société GOOGLE Inc et l’EURL GOOGLE ne se sont pas comportées en simples « prestataires techniques », activité de stockage de données relevant des dispositions de l’article 6, 20 de la loi dite LCEN du 21 juin 2004, mais ont, à partir des données à la constitution desquelles elles ont joué un rôle actif; diffusé des messages publicitaires sous forme de liens commerciaux au profit d’annonceurs qui les rémunèrent pour la diffusion, ce qui constitue une activité de régie publicitaire à l’occasion de laquelle elles peuvent engager leur responsabilité sur le fondement du droit commun; que notamment elles doivent répondre du choix qu’elles agréent, de mots-clefs (choix effectué par les annonceurs avec le concours des sociétés Google) et vérifier que la mise en ligne des liens commerciaux sponsorisés ne porte pas atteinte aux droits des tiers, sans pouvoir invoquer une soi-disant « impossibilité matérielle, juridique et économique» pour opérer une vérification « a priori » ; qu’un empêchement de cette triple nature, à le supposer établi, ne peut exonérer un opérateur économique de toute responsabilité, mais doit le conduire à renoncer à cette activité ou bien, s’il persiste à la poursuivre, à en assumer les conséquences;
Attendu qu’il est démontré par la SAS TWE Industries que la société GOOGLE Inc et/ou l'EURL GOOGLE sont intervenues positivement pour assister les annonceurs lorsque ces dentiers ont ouvert un compte AdWords et ont déterminé les mots clefs qui déclencheront l’affichage de liens commerciaux sponsorisés ; que s’il n’est pas avéré que les sociétés Google ont proposé directement à des annonceurs, au cours de la procédure de création de leur compte AdWords, le signe « Remote-Anything » comme mot-clef, elles ont recommandé la consultation du « Générateur de mots-clefs » destiné à sélectionner les mots-clefs les plus pertinents ; que des annonceurs ont usé du service proposé parles sociétés Google afin d’optimiser le choix de leurs mots-clefs et d’obtenir une fréquence d’affichages plus élevée de leurs liens commerciaux et ont arrêté leur choix en faveur du mot-clef litigieux « Remote-Anything » à la suite de l’intervention active et intéressée des sociétés Google, qui sont rémunérées au nombre de « clic » effectués par les internautes sur les liens commerciaux sponsorisés qui sont affichés ; que par l’aide apportée aux annonceurs lors du choix des mots-clefs pertinents, les sociétés Google qui tirent un intérêt commercial de la diffusion des messages de publicité sous forme de liens commerciaux, ont participé à la reproduction de la marque déposée; « Remote-Anything » et à l’usage de cette marque reproduite; qu’il importe peu que les sociétés Google aient rappelé aux annonceurs de messages publicitaires dans les conditions générales des contrats, l’interdiction de porter atteinte aux droits des tiers, résultant notamment de la propriété intellectuelle et plus spécialement résultant du droit des marques et leur aient adressé des invitations ou avertissements à vérifier la disponibilité des termes qu’ils choisissent en guise de mots-clefs ; que leur responsabilité au litre de la contrefaçon par usage d’une marque reproduite, demeure parallèlement à celle des annonceurs;
Attendu que la SAS TWD Industries impute à la société GOOGLE Inc et à l’EURL GOOGLE des faits de concurrence déloyale, de parasitisme et plus généralement un comportement contraire à la bonne foi et à la loyauté devant présider aux relations commerciales, en ne vérifiant pas les choix des mots-clefs effectués par les annonceurs et les aidant même à choisir comme mots-clefs des signes pouvant constituer des marques ; que des tels agissements se confondent avec ceux déjà sanctionnés au titre de la contrefaçon de marque et ne peuvent fonder une demande en réparation civile sur le fondement de la responsabilité quasi délictuelle ; qu’aucune circonstance particulière caractérisant à la charge des sociétés Google des faits fautifs distincts des faits de contrefaçon, n’est suffisamment établie par la SAS TWD Industries; que l’utilisation de mots-clefs par le moteur de recherche Google (notamment le vocable générique anglais « remote »), qui ne sont pas la reproduction exacte de la marque déposée, n’est pas incriminable;
Attendu que la SA.S. TWD Industries ne fait pas la preuve suffisante que les sociétés Google ont commis des actes constitutifs de dénigrement, de détournement de clientèle et/ou de publicité mensongère au profit de « partenaires commerciaux » qu’elle désigne dans ses conclusions, mais dont elle n’établit pas précisément les liens avec les sociétés Google ; que la publicité mensongère ne peut être invoquée dès lors que les liens commerciaux sponsorisés qui s’affichent sur l’écran sous un emplacement réservé à cet effet, ne peuvent être considérés par un internaute « pratiquant » (d’attention moyenne) comme ayant une relation commerciale nécessaire avec le ou les site(s) recherchée(s) figurant sur la colonne « résultats »; que les références des sites affichés comme liens commerciaux sont différentes de celles des sites figurant sous la colonne « résultats »; (...)"
Remerciements à Cédric Manara pour la communication de cet arrêt
Minute intégrale de l'arrêt téléchargeable en cliquant sur le lien ci-dessous