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Rubrique : jurisprudence - texte / Branche : droit des obligations ; preuve ; responsabilité / Domaine : contenus et comportements illicites
Citation : , Cour de cassation, ch. criminelle, 6 mai 2003, Alain X. c/ Annie B. , Juriscom.net, 06/05/2003
 
 
Cour de cassation, ch. criminelle, 6 mai 2003, Alain X. c/ Annie B.

édité sur le site Juriscom.net le 06/05/2003
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COUR DE CASSATION

Chambre criminelle, audience publique du 6 mai 2003, Rejet

Alain X. c/ Annie B.

 

N° de pourvoi : 02-80284

Publié au bulletin

Président : M. COTTE

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le six mai deux mille trois, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller référendaire DESPORTES, les observations de la société civile professionnelle MONOD et COLIN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l’avocat général DAVENAS ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Alain, dit Y...,

contre l’arrêt de la cour d’appel de VERSAILLES, 8ème chambre, en date du 13 décembre 2001, qui, sur renvoi après cassation, l’a condamné pour diffamation publique et injure publique à 50 000 francs d’amende avec sursis, a ordonné la publication de la décision et prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

I - Sur l’action publique :

Attendu que, selon l’article 2, 3 , de la loi du 6 août 2002, sont amnistiés, lorsque, comme en l’espèce, ils sont antérieurs au 17 mai 2002, les délits de presse ; qu’ainsi l’action publique est éteinte à l’égard du prévenu ;

Attendu, cependant, que, selon l’article 21 de la loi d’amnistie précitée, la juridiction de jugement saisie de l’action publique reste compétente pour statuer sur les intérêts civils ;

II - Sur l’action civile :

Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 6 1, 6 3 c de la Convention européenne des droits de l’homme, 410, 411, 417, 512, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;

”en ce que la cour d’appel, passant outre à l’absence d’Alain X... à l’audience des débats du 27 septembre 2001 et à sa demande de renvoi à une audience ultérieure, a retenu l’affaire à cette audience et prononcé au fond par arrêt contradictoire ;

”alors que le prévenu appelé à comparaître devant la juridiction correctionnelle, soit pour une infraction passible d’une peine d’amende ou d’une peine d’emprisonnement inférieure à deux années, soit sur citation directe de la partie civile, quelle que soit la durée de la peine encourue, ne peut être jugé en son absence, fût-ce après que son défenseur a été entendu, que s’il en a fait la demande par lettre adressée au président et jointe au dossier de la procédure ; qu’en l’espèce, il ressort des pièces de procédure que, loin de demander à être jugé en son absence, Alain X..., poursuivi à la seule requête de la partie civile des chefs de diffamation et injures publiques envers un particulier, a, par une lettre adressée au président une semaine avant l’audience par son avocat et par des conclusions déposées à l’audience par ce dernier, exprimé sans ambiguïté sa volonté de comparaître personnellement devant la juridiction correctionnelle ; qu’en le jugeant cependant en son absence, seul son avocat ayant été entendu, et en statuant par un arrêt contradictoire, la cour d’appel a violé les textes et principes susvisés ;

”alors, en tout état de cause, que, si les juges apprécient souverainement les causes de renvoi invoquées, ils sont tenus de statuer, par des motifs suffisants, sur la demande de renvoi dont ils sont saisis ; qu’en l’espèce, Alain X... avait, en invoquant les exigences d’un procès équitable et le principe de l’égalité des armes, manifesté sa volonté de comparaître personnellement, assisté de son avocat de Papeete, pour s’expliquer sur les faits qui lui étaient reprochés, il avait fait valoir, en fournissant un certificat médical, qu’ayant été opéré à coeur ouvert, il ne pouvait faire le trajet de Papeete à Versailles pour le 27 septembre 2001 et il avait sollicité le renvoi de l’affaire, en précisant qu’il serait à Paris pour des soins médicaux entre le 10 novembre et le 3 décembre 2001, ce à quoi ne s’opposait pas le conseil de la partie civile ; qu’en se bornant à mentionner dans son arrêt que le prévenu qui ne comparaissait pas, était représenté par son conseil (métropolitain), sans répondre à la demande de renvoi dont elle était saisie, la cour d’appel a entaché sa décision d’une omission de statuer et, à tout le moins, d’un défaut de motifs” ;

Attendu que le demandeur ne saurait se faire un grief de ce que la cour d’appel ait omis de répondre aux conclusions sollicitant le renvoi de l’affaire aux fins de permettre sa comparution personnelle, dès lors qu’il était représenté à l’audience par un avocat de son choix qui a plaidé au fond et qu’il a fait déposer des conclusions sur le fond auxquelles il a été répondu par les juges ;

D’où il suit que le moyen ne peut qu’être écarté ;

Sur le second moyen de cassation pris de la violation de l’article 6 2 de la Convention européenne des droits de l’homme, des articles 29, 32, 33, 42 et 43 de la loi du 29 juillet 1881, 121-7 du Code pénal, de l’article préliminaire et des articles 591 et 593 du Code de procédure pénale ;

”en ce que l’arrêt attaqué a déclaré Alain X... coupable des délits de diffamation et d’injure publiques envers un particulier, en l’espèce envers Annie B... dite C... ;

”aux motifs que les dispositions de l’article 43 de la loi du 29 juillet 1881 sur la presse écrite, déterminant les règles de complicité en matière de délits de presse, sont applicables aux infractions commises au moyen d’un site Internet ; qu’est expressément visé comme complice d’un délit de presse, l’auteur des écrits diffamatoires ou injurieux ; que les auteurs d’écrits seront poursuivis comme complices, même si le directeur de publication comme en l’espèce est identifié sans être poursuivi ; qu’Alain X... ne fournit aucun élément déterminant à l’appui de son allégation de faux ; que bien au contraire, toute la défense de l’intéressé, et une grande partie des documents versés aux débats établissent que sous le pseudonyme de Y..., Alain X... a assumé la paternité des propos visés par la requérante ; que bien évidemment, la possibilité, pour un tiers malveillant, de pouvoir fabriquer de tels documents ne signifie pas qu’il s’agit en l’espèce de faux ; qu’il en va de même pour l’accusation de détournement de site ; qu’Alain X..., alias Y... n’a jamais intenté aucune action pour dénoncer le piratage qui aurait eu pour conséquence de l’exposer à des poursuites pénales ; qu’il apparaît d’ailleurs peu vraisemblable qu’on ait pu pénétrer sur le site internet, de manière continue durant douze jours, sans que son propriétaire ne s’en aperçoive, alors que certains écrits entourant l’article litigieux étaient modifiés ou carrément changés ; qu’Alain X... alias Y... s’est toujours présenté, notamment en offrant, devant le tribunal de prouver la vérité des faits diffamatoires, comme le seul auteur intellectuel des propos incriminés ; que par ailleurs, après le problème cardiaque qui a valu à Alain X... alias Y... d’interrompre ses activités, un éditorial daté du 23 décembre 1999, signé par son “fidèle ami” S. C., a énoncé que pour ce qui est des propos diffamatoires et injurieux, Y... n’avait que “forcé le trait pour rendre les choses plus parfaites, comme un artiste” ;

que cette paternité est confirmée par une chronique multimédia de l’hebdomadaire Tiki Magazine qui met en valeur, fin août 1999, le site de Y..., qualifié de plus délirant de Polynésie ; que sur ce point, Jean-Marc Z... et Jérôme A..., dont les témoignages ont été régulièrement versés aux débats, certifient avoir à plusieurs reprises et notamment en juillet 1999, lu sur le site “ sous la rubrique page d’accueil “l’esclaffaite de l’artiste, lettres confidentielles”, l’éditorial mettant en cause Annie B... dite C... signé Y... qui a d’ailleurs pu être imprimé par leurs soins ; que ces témoignages n’ont pas non plus été attaqués judiciairement ; qu’il y a lieu, en conséquence, de retenir Alain X... dans les liens de la prévention en qualité de complice des faits visés dans la citation ;

”alors, d’une part, qu’en déclarant, dans le dispositif de son arrêt, Alain X... “coupable des délits de diffamation et d’injures publiques” après avoir retenu, dans les motifs de cet arrêt, qu’Alain X... “n’étant pas propriétaire du site à la date des faits incriminés”, il ne pouvait être retenu dans les liens de la prévention que comme auteur des propos incriminés “en qualité de complice des faits visés par la prévention”, la cour d’appel a entaché sa décision d’une contradiction irréductible ;

”alors, d’autre part, que les dispositions des articles 42 et 43 de la loi du 29 juillet 1881 ne sont applicables qu’à la presse écrite ; que la détermination des personnes pénalement responsables des délits de diffamation et injures publiques commis par la voie du réseau Internet, avant l’intervention de la loi du 1er août 2000 inapplicable en l’espèce, doit être établie selon les règles du droit commun ; qu’en affirmant le contraire et en déduisant la responsabilité pénale d’Alain X... comme complice du délit de diffamation et injure publiques de sa seule qualité d’auteur de l’article incriminé sans indiquer en quoi Alain X... aurait sciemment permis que cet article acquière un caractère public par sa diffusion sur un site Internet dont elle a elle-même admis qu’il n’était pas propriétaire, la cour d’appel n’a caractérisé ni l’existence d’un acte de complicité de droit commun ni l’intention coupable du demandeur, et a violé les textes susvisés ;

”alors, enfin, qu’il appartient à la partie poursuivante de prouver la matérialité des propos invoqués comme étant diffamatoires et injurieux ; qu’en l’espèce, Alain X... faisait valoir que le document imprimé sur la base duquel les poursuites avaient été mises en oeuvre, censé être la reproduction de l’article incriminé diffusé par la voie du réseau Internet sur le site , ne suffisait pas à établir la teneur de cet article, tel qu’il était lisible sous la forme électronique lors de la consultation du site ; qu’en exigeant du prévenu la preuve de la fausseté du document imprimé et en énonçant des motifs inopérants au regard du point de savoir si l’article litigieux était rédigé dans les mêmes termes sur le document électronique mis en ligne et sur le document imprimé ayant servi de base aux poursuites, seul versé aux débats, la Cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision” ;

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure qu’Annie B..., dite C..., a fait citer Alain X..., dit Y..., devant le tribunal correctionnel des chefs d’injure et de diffamation publiques à raison de la diffusion par internet, à compter du 12 juillet 1999, sur le site “ d’un article intitulé “Lesclaffaite de l’Artiste, lettres confidentielles” ;

Attendu qu’après avoir constaté qu’Alain X... ne pouvait être retenu comme auteur principal dès lors que, n’étant pas propriétaire du site précité, il n’avait pas la qualité de directeur de publication au sens de l’article 42 de la loi du 29 juillet 1881, la cour d’appel énonce qu’étant l’auteur des propos incriminés, il doit, en cette qualité, être déclaré responsable comme complice sur le fondement de l’article 43 de ladite loi ; que, pour répondre à l’argumentation de l’intéressé qui contestait son implication en invoquant une possible manipulation informatique, les juges retiennent, notamment, que la teneur des propos et leur diffusion sur le site concerné sont établis, tant par le document reproduisant, après impression, la page électronique qui en était le support, que par le témoignage de plusieurs personnes ayant déclaré avoir pris connaissance du message incriminé en accédant au site “” durant la période visée par la prévention ; que les juges précisent que le prévenu avait lui-même “assumé la paternité” de l’article diffusé et qu’au cours de la procédure, il s’était d’abord présenté comme son seul auteur en offrant de prouver la vérité des faits diffamatoires; qu’ils relèvent enfin que la rédaction de cet article lui a été également attribuée par l’un de ses proches amis ;

Attendu qu’en l’état de ces motifs procédant de son appréciation souveraine, d’où il résulte que le prévenu était l’auteur des propos injurieux et diffamatoires et qu’il a eu l’intention de les diffuser, la cour d’appel a justifié sa décision ;

Que, si c’est à tort que les juges ont fait application de l’article 43 de la loi du 29 juillet 1881 alors que, les infractions reprochées ayant été commises par un moyen de communication audiovisuelle au sens de l’article 2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, seules étaient applicables les dispositions de l’article 93-3 de la loi n° 82-652 du 29 juillet 1982, pour autant, l’arrêt attaqué n’encourt pas la censure, dès lors qu’en application de ce texte, les mêmes règles étaient applicables au prévenu ;

Que, par ailleurs, la mention du dispositif de l’arrêt attaqué déclarant Alain X... coupable des délits de diffamation et d’injure publiques, alors que seule la complicité de ces délits avait été retenue à son encontre, procède d’une simple erreur matérielle ne pouvant donner ouverture à cassation ;

D’où il suit que le moyen doit être écarté ;

Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;

Par ces motifs;

I - Sur l’action publique :

La DECLARE ETEINTE ;

II - Sur l’action civile :

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Cotte président, M. Desportes conseiller rapporteur, M. Joly, Mmes Chanet, Anzani, Mazars, MM. Beyer, Pometan conseillers de la chambre, MM. Ponsot, Valat, Mme Ménotti conseillers référendaires ;

Avocat général : M. Davenas ;

Greffier de chambre : M. Souchon ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;

Décision attaquée :cour d’appel de VERSAILLES, 8ème chambre 2001-12-13

 

 

 

 

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