COUR D'APPEL DE VERSAILLES
12ème chambre, section 1, 8 juin 2000
Sté Multimania Production c/ Lynda N. épouse L., SARL France Cybermedia, SARL SPPI, Société Esterel
La cour d’appel de VERSAILLES, 12ème chambre section 1 a rendu l’arrêt RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE suivant, prononcé en audience publique.
La cause ayant été débattue à l’audience publique du 27 Avril 2000,
La cour étant composée de :
Monsieur Jean-Louis GALLET, président
Monsieur Alain RAFFEJEAUD, conseiller
Monsieur Jacques DRAGNE, conseiller,
Assisté de Catherine CLAUDE, greffier,
Et ces mêmes magistrats en ayant délibéré conformément à la loi,
DANS L’AFFAIRE ENTRE :
S.A MULTIMANIA PRODUCTION
CONCLUANT PAR Me Jean Pierre BINOCHE (avoué à la Cour)
PLAIDANT PAR Me SEDALLIAN (avocat au barreau de 79)
APPELANTE
ET
Madame Lynda H. épouse L.
CONCLUANT PAR la SCP JULLIEN/LECHARNY/ROL (avoués à la Cour)
PLAIDANT PAR Me Luc BROSSOLET (Avocat au barreau de PARIS)
S.A.R.L. FRANCE CYBERMEDIA
INTIMÉE NON REPRÉSENTÉE - Assignée à personne présente
S.A.R.L. SPPI
INTIMÉE NON REPRÉSENTÉE - Assignée à personne présente
SOCIÉTÉ ESTEREL
INTIMÉE DÉFAILLANTE - PV de recherches infructueuses article 659 du NCPC
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :
Selon acte d’huissier dressé à PARIS les 21, 23, 24 juin 1999, Mme Lynda L. a fait constater que diverses photographies la représentant totalement ou partiellement dénudée, pour lesquelles elle avait accepté de poser dans le cadre de son activité de mannequin qu’elle avait exercée dix ans auparavant, pouvaient être consultées sur les sites Internet suivants :
Frenchcelebs hébergé par la société MULTIMANIA (deux clichés)
Voila hébergé par la société ESTEREL (cinq clichés)
PARISVOYEUR hébergé par la société CYBERMÉDIA ou la société SPPI (cinq clichés)
Goutemoi hébergé par la société CYBERMEDIA ou la société SPPI (cinq clichés)
Bandante hébergé par la société CYBERMEDIA ou la société SPPI (cinq clichés)
Faisant valoir qu’elle n’avait jamais donné son consentement à la diffusion de ces photographies et qu’il était porté atteinte au droit qu’elle a sur son image, Mme Lynda L. a, par acte d’huissier en date du 17 septembre 1999, assigné à jour fixe les sociétés MULTIMANIA PRODUCTION, FRANCE CYBERMEDIA, SPPI et ESTEREL sur le fondement des articles 9 et 1382 du code civil, aux fins de voir les sociétés défenderesses condamnées à lui réparer son préjudice, à retirer toutes les photographies la concernant des sites qu’elles hébergent ou créent, et à insérer sur chacun de ces sites un communiqué judiciaire annonçant la condamnation prononcée.
Par jugement rendu le 8 décembre 1999, le tribunal de grande instance de NANTERRE a rejeté l’exception d’incompétence soulevée par les sociétés FRANCE CYBERMEDIA et SPPI et tirée de ce que la juridiction compétente serait le tribunal de grande instance de PARIS dans le ressort duquel les faits on t été constatés, en retenant, en application de l’article 46 du NCPC, que le dommage se réalise au lieu où sont chargées, par toute personne désirant se connecter au réseau Internet, les données disponibles sur le serveur, et qu’en l’espèce, il n’était pas contesté ni concevable que les serveurs des sociétés défenderesses sont accessibles de tous les points du territoire nationale où réside un internaute. Il a également rejeté la demande de sursis à statuer formée par la société MULTIMANIA PRODUCTION pour identifier l’éditeur du contenu de site litigieux qu’elle abrite, en retenant que cette société, qui s’abstient de demander à son cocontractant les éléments essentiels de son identité lors de l’ouverture du site, est à l’origine de la difficulté invoquée et, au demeurant, a bénéficié d’un délai suffisant depuis l’assignation pour obtenir les renseignements qu’elle réclame, étant ajouté que la responsabilité du fournisseur d’hébergement est indépendante de la présence au procès e l’éditeur du site. Quant au fond, au visa des articles 9, 1382 et 1383 du code civil, il a déclaré les sociétés MULIMANIA PRODUCTION, FRANCE CYBERMEDIA, SPPI et ESTEREL responsables des atteintes portées au droit que Mme Lynda L. a sur son image, a condamné la société MULTIMANIA PRODUCTION à payer à la demanderesse la somme de 20.000,00 frs, la société ESTEREL, la somme de 50.000,00 frs, les sociétés FRANCE CYBERMEDIA et SPPI in solidum, la somme de 100.000,00 frs, et la société FRANCE CYBERMEDIA, la somme de 50.000,00 frs, à titre de dommages et intérêts, a ordonné aux sociétés FRANCE CYBERMEDIA et SPPI la publication d’un communiqué intitulé « avertissement judiciaire » relatant la décision, selon des modalités définies, sous astreinte, a ordonné aux sociétés défenderesses la mise en place d’un processus de recherche approprié permettant de retrouver et de supprimer des sites qu’elles hébergent toutes les photographies représentant Mme Lynda L., a ordonné à la société SPPI de retirer lesdites photographies des sites qu’elle crée, sous astreinte, et a condamné les sociétés défenderesses au paiement de la somme de 20.000,00 frs en application de l’article 700 du NCPC. Le tribunal a constaté l’atteinte au droit à l’image de Mme Lynda L. qui n’a pas donné son autorisation à l’utilisation faite de ses photographies, a retenu la responsabilité de la société SPPI en tant que créatrice des sites Parisvoyeur et Bandante, et, après avoir énoncé que l’activité du fournisseur d’hébergement, qui lui permet de vérifier le teneur des informations stockées dans le site mais participe de la liberté d’expression, excède la simple prestation technique d’un transmetteur d’informations, de sorte que celui-ci, soumis au régime de responsabilité de droit commun de l’article 1383 du code civil, est tenu d’une obligation générale de prudence et de diligence qui doit le conduire à prendre les précautions nécessaires pour éviter de léser les droits des tiers et mettre en œuvre à cette fin des moyens raisonnables d’informations, de vigilance et d’action, a considéré que seule la société MULTIMANIA PRODCUTION avait rempli son obligation d’information en donnant connaissance aux créateurs de site la charte par laquelle elle attire l’attention sur le nécessaire respect des droits des tiers alors que les sociétés FRANCE CYBERMEDIA, ESTEREL et SPPI n’ont justifié d’aucune diligence sur ce point, et a estimé que les sociétés défenderesses avaient manqué à leurs obligations de prudence et de diligence en ne mettant pas en place une procédure qui leur permettrait de détecter la présence d’un site au contenu illicite et de mettre en demeure les éditeurs de ce site de se conformer à leurs obligations conventionnelles ou légales de respecter les droits des tiers ou de justifier du caractère licite de données apparemment contrevenantes, avant de procéder à la fermeture. Il a également noté que les sociétés MULTIMANIA PRODUCTION, FRANCE CYBERMEDIA et SPPI ont procédé à la fermeture des sites litigieux après réception de l’assignation de Mme Lynda L. alors que la société ESTEREL n’a fait état d’aucune diligence particulière.
La société MULTIMANIA PRODUCTION a formé appel de cette décision par déclaration en date du 26 janvier 2000.
Dans ses écritures, se présentant comme l’une des premières plate-formes d’hébergement gratuits de sites Internet en France avec plus de 200.000 sites, après avoir rappelé la fonction technique d’un serveur d’hébergement de sites Web pour souligner qu’il n’a aucune maîtrise sur le contenu des informations avant que celles-ci soient disponibles sur Internet et qu’il n’est pas possible techniquement de contrôler en temps réel les informations hébergées, l’appelante souligne que l’ouverture d’un compte d’hébergement chez elle implique l’adhésion du futur membre à une charte qui détaille les droits et obligations contractés, notamment l’interdiction de diffuser des informations à caractère pornographique ou érotique, et précise avoir pris des mesures pour détecter d’éventuels contenus illicites ou prohibés, ces contrôles trouvant cependant leurs limites dans sa légitimité à apprécier la légalité des contenus et dans le principe de la liberté de communication. Elle fait valoir qu’au regard des projets de textes envisagés, la responsabilité de l’hébergeur est appréciée en fonction des possibilités de contrôle dont il dispose, de la connaissance qu’il a d’une diffusion litigieuse, et des diligences qu’il effectue pour faire cesser une diffusion illicite dont il a connaissance. En l’espèce, elle invoque une violation du principe du contradictoire en ce que le tribunal a requalifié d’office le fondement juridique de la demande en substituant l’article 1383 à l’article 1382 allégué par la demanderesse, sans ordonner la réouverture des débats. Elle critique le tribunal d’avoir retenu des considérations techniques erronées en affirmant qu’un système de détection pouvait être facilement mis en place, et d’avoir procédé à analyse erronée des données du litige en ne distinguant pas son rôle d’hébergeur grand public de celui des autres sociétés défenderesses qui hébergent en connaissance de cause des sites pornographiques. Elle fait état de l’impossibilité d’exécuter la demande de retrait du serveur de toutes les photographies de Mme Lynda L. ordonnée par le tribunal, faute de pouvoir contrôler en permanence l’ensemble des pages Web qu’elle héberge et en l’absence d’un processus de recherche approprié permettant de retrouver et de supprimer des sites hébergés par elle les photographies qui représente Mme L., d’autant que le jugement n’a donné aucune limite dans le temps aux mesures ordonnées. Elle relève que l’auteur du site litigieux est désormais identifié et que les demandes de Mme L. doivent être dirigées contre lui. Elle dénie toute responsabilité, en sollicitant en premier lieu l’annulation du constat d’huissier initial qui ne reflète pas la réalité des recherches effectuées par l’officier ministériel pour retrouver les photographies litigieuses. Elle soutient n’avoir commis aucune faute au regard de l’article 1382 du code civil auquel il convient de se référer, à l’exclusion de l’article 1383 du même code, et ajoute n’avoir en tout cas pas davantage eu un comportement fautif au regard de ce dernier texte, en expliquant que, contrairement à l’opinion des premiers juges, la recherche par mots clés évoquant « la nudité, la beauté, la célébrité, la féminité, est insuffisante pour repérer les photographies litigieuses ou la présence d’un contenu de site illicite, de sorte que, eu égard aux moyens raisonnables de contrôle qu’elle a mis en oeuvre, elle n’a pas manqué à son obligation de vigilance, et qu’elle a agi pour fermer le compte litigieux et en prévenir la réouverture. À titre subsidiaire, elle sollicite la désignation d’un consultant pour répondre aux questions techniques posées par le fonctionnement d’Internet. À titre encore plus subsidiaire, elle conteste le préjudice subi par Mme L., laquelle ne peut en tout cas demander réparation que du seul préjudice effectivement subi dans le ressort du tribunal de grande instance de Nanterre, de sorte que son montant doit être divisé par le nombre de départements. Elle approuve le tribunal d’avoir écarté la publication judiciaire en ce qui la concerne. Elle fait valoir que Mme L. n’avait pas demandé la condamnation solidaire des défenderesses au titre de l’article 700 du NCPC de sorte qu’il y a lieu d’infirmer le jugement en ce qu’il a prononcé une condamnation in solidum à ce titre. En définitive, elle demande à la cour d’infirmer le jugement entrepris, et, à titre principal, de lui donner acte que l’auteur du site litigieux a été identifié et donc de renvoyer Mme L. à diriger ses demandes contre celui-ci, de lui donner acte de ses diligences pour retrouver et supprimer des sites qu’elle héberge des photographies représentant Mme L. et, en conséquence, de dire n’y avoir plus lieu d’ordonner une quelconque mesure de recherche et de suppression desdites photographies, de constater que la preuve n’est pas rapportée de sa participation volontaire à la diffusion des photographies litigieuses et qu’elle n’a commis aucune faute, de débouter Mme L., de condamner celle-ci à lui restituer la somme de 20.000,00 frs versés dans le cadre de l’exécution provisoire, et à titre subsidiaire de désigner un consultant, et, à titre infiniment subsidiaire, de ramener la condamnation à un montant symbolique, outre l’application de l’article 700 du NCPC.
Par conclusions signifiées le 11 avril 2000, Mme Lynda L. se fonde sur la motivation du tribunal. Elle conteste la prétendue violation du principe du contradictoire dont l’appelante ne tire aucune conséquence et s’oppose au sursis à statuer en faisant remarquer que la société MULTIMANIA PRODUCTION n’a pas attrait dans la cause l’auteur du site. Elle affirme la responsabilité de cette société qui a manqué à son obligation de vigilance, en soulignant qu’il appartient à celle-ci de prendre des garanties auprès de ses cocontractants et que la recherche de sites illicites n’est pas insurmontable. Elle estime justifiée la réparation que le tribunal lui a allouée, et que l’obligation de moyens que le tribunal a mis à la charge de la société MULTIMANIA PRODUCTION est pertinent et réalisable. Elle demande donc la confirmation du jugement entrepris, outre l’application de l’article 700 du NCPC.
La procédure a été évoquée à l’audience du 27 avril 2000, dans le cadre de la procédure à jour fixe
SUR CE, LA COUR :
Considérant que le premier juge, tenu de trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables et de donner ou restituer aux faits litigieux leur exacte qualification, n’a pas, en l’espèce, modifié l’objet du litige et, partant, n’a pas enfreint le principe du contradictoire en fondant sa décision, sans réouvrir les débats, sur les dispositions de l’article 1383 du code civil alors que seul l’article 1382 du même code était visé dans l’acte introductif d’instance de la demanderesse : qu’en effet, les prétentions de celle-ci étant fondées sur la responsabilité délictuelle de la société MULTIMANIA PRODUCTION découlant de l’hébergement d’un site à partir duquel avaient été diffusées, sans autorisation, des photographies représentant Mme Lynda H. épouse L. nue ou légèrement vêtue, tous les éléments d’appréciation du comportement fautif de la société prestataire d’hébergement se sont trouvés dans le débat, de sorte que le juge a pu, sans avoir à provoquer spécialement la discussion des parties sur ce point, retenir la qualification de faute quasi-délictuelle, tirée de l’article 1383 du code civil, plutôt que celle de la faute délictuelle, tirée de l’article 1382 du même code ;
Considérant qu’il n’est pas contesté que la diffusion sur le réseau Internet des photographies de Mme Lynda L., sans son autorisation, constitue une atteinte au droit qu’elle a sur son image, attribut de sa personnalité ; qu’à cet égard, le constat d’huissier dont l’objet est seulement d’authentifier l’existence de ces photographies dans des sites du réseau Internet et de relever les noms des créateurs ou des intermédiaires intervenant dans leur diffusion n’est affecté d’aucune irrégularité, même si l’officier ministériel a été informé préalablement de ce qu’il devait constater et des moyens d’accéder aux sites litigieux, ces informations n’étant pas de nature à vicier les constatations effectuées, au demeurant non sérieusement contestées, ni à influer sur l’appréciation des possibilités de découvertes de ces sites par un internaute et, a fortiori, par la société prestataire d’hébergement ;
Considérant qu’il est constant que le site dénommé Frenchcelebs à partir duquel cette diffusion s’est opérée, a été créé par un particulier, client-titulaire d’un compte auprès de la société MULTIMANIA PRODUCTION ;
Que cette dernière ne peut arguer de l’identification, au demeurant tardive, du créateur du site litigieux pour soutenir que seul celui-ci, qui pourrait contester l’atteinte portée au droit à l’image de Mme L., est responsable de la diffusion litigieuse, alors que la responsabilité de cet éditeur du contenu incriminé n’exclut pas de rechercher si le comportement fautif de l’hébergeur n’a pas concouru à la réalisation du dommage de la victime, étant relevé que la société MULTIMANIA PRODUCTION s’est bien gardée d’attraire cet éditeur dans la cause, comme elle en avait la possibilité par la voie de l’intervention forcée ;
Considérant qu’à l’occasion de l’exercice de son activité, une société prestataire d’hébergement est tenue à une obligation de vigilance et de prudence quant au contenu des sites qu’elle accueille et dont elle assure la connexion au réseau Internet aux fins de diffusion, par l’intermédiaire de fournisseurs d’accès, de messages écrits, visuels ou sonores, qui s’analyse en une obligation de moyens portant sur les précautions à prendre et les contrôles à mettre en œuvre pour prévenir ou faire cesser le stockage et la fourniture de messages contraires aux dispositions légales en vigueur ou préjudiciables aux droits des tiers concernés ; que cette obligation de moyens, qui n’implique pas l’examen général et systématique des contenus des sites hébergés, doit néanmoins se traduire, au stade de la formation du contrat avec le client-créateur de site, par des mesures préventives tels la prohibition de l’anonymat ou de la non-identification, l’adhésion à une charte de comportement ou tout autre procédé incitatif au respect des textes et des droits des personnes, et, au stade de l’exécution du contrat, par des diligences appropriées pour repérer tout site dont le contenu est illégal, illicite ou dommageable afin de provoquer une régularisation ou d’interrompre la prestation ; qu’indépendamment des cas où elle en est requise par l’autorité publique ou sur décision judiciaire, de telles diligences doivent être spontanément envisagées par la société prestataire d’hébergement lorsqu’elle a connaissance ou est informée de l’illégalité, de l’illicéité ou du caractère dommageable du contenu d’un site ou lorsque les circonstances ou modalités de la réalisation, de l’évolution ou de la consultation d’un site, auxquelles elle doit veiller par des outils, méthodes ou procédures techniques d’analyse, d’observation et de recherche, la mettent en mesure d’en suspecter le contenu ; que, dans ces hypothèses, ces diligences ne trouvent, sous le contrôle du juge, d’autres limites que l’incompétence ou l’abus de droit de l’hébergeur à apprécier l’illégalité, l’illicéité ou le caractère dommageable du contenu litigieux ; qu’en dehors de ces hypothèse, il ne peut être fait grief à cet hébergeur de ne pas avoir contrôlé le contenu d’un site qu’il a pu légitimement ignoré ;
Considérant, en l’espèce, qu’il est constant que la société MULTIMADIA PRODUCTION souligne, dans sa page d’accueil-abonnement comme dans la charte qu’elle soumet à l’acceptation de son client lors de la conclusion du contrat, valablement conclu entre eux, l’obligation pour l’utilisateur de ses prestations, parfaitement identifiable, de respecter les droits d’autrui, notamment les droits de la personnalité, tel le droit à l’image ; qu’il n’est pas prétendu qu’elle ait connu ou été informée du contenue du site édité par son client, avant l’introduction de l’instance, ni, a fortiori, qu’elle en ait su le caractère illicite au regard du droit à l’image de Mme L., qu’il n’est pas établi ni même allégué que les circonstances ou modalité de réalisation, d’évolution, de fréquentation ou de consultation du site litigieux ont pu lui en faire suspecter le contenu, étant noté que n’est pas contestée la mise en place, dans le cadre de l’exercice de son activité, des outils d’analyse statistiques des sites les plus consultés ou des transferts de fichiers volumineux ainsi que des procédés raisonnables de détection de contenus illégaux ou illicites ; que, dans ces conditions, indépendamment des difficultés techniques actuelles relatives au contrôle des fichiers d’images, il ne peut lui être reprochés, en tant qu’hébergeur grand public, de n’avoir pas procédé spontanément au contrôle du contenu du site litigieux qui a pu, en l’occurrence, légitimement lui rester inconnu, dès lors qu’elle ne saurait être investie, sans risque pour la liberté d’expression, de communication ou de création, d’une mission qui la conduirait à s’ingérer systématiquement dans les rapports de droit entre les particuliers, étant encore ajouté que le repérage du site Frenchcelebs (célébrités françaises), dont l’intitulé n’évoque pas nécessairement un contenu illégal ou illicite, contenant deux photos de Mme Lynda L. totalement ou partiellement dévêtue ne lui aurait pas pour autant fait apparaître que l’éditeur était manifestement sans droit quant à l’exploitation desdites photos ;
Qu’il n’est pas contesté qu’aussitôt après avoir été avisée de l’illicéité de la diffusion des photographies de Mme Lynda L., la société MULTIMANIA PRODUCTION a pris toutes les mesures utiles pour faire identifier l’éditeur, pour fermer le compte Frenchcelebs et empêcher la réouverture d’un site contenant lesdites photographies ; qu’elle a ainsi satisfait à l’obligation de faire cesser l’exploitation irrégulière du contenu du site litigieux dont elle était désormais informée ;
Qu’il s’ensuit que n’est pas rapporté la preuve d’une négligence ou imprudence commise par la société MULTIMANIA PRODUCTION et susceptible d’engager sa responsabilité à l’égard de Mme Lynda L. ;
Qu’il convient, en conséquence, d’infirmer le jugement entrepris ; que Mme L. devra restituer la somme de 20.000,00 frs qui lui a été versée dans le cadre de l’exécution provisoire dudit jugement ;
Considérant que l’équité ne commande pas l’application de l’article 700 du NCPC ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,
DÉCLARE recevable l’appel interjeté par la société MULTIMANIA PRODUCTION à l’encontre du jugement rendu par le tribunal de grande instance de NANTERRE,
LE DIT bien fondé,
Y FAISANT DROIT,
INFIRME le jugement entrepris en ses dispositions relatives à la société MULTIMANIA PRODUCTION,
DIT que la société MULTIMANIA PRODUCTION n’a pas commis de faute à l’origine du préjudice résultant de l’atteinte au droit à l’image invoquée par Mme Lynda L.,
DÉBOUTE Mme Lynda H. épouse L. de ses demandes à l’encontre de la société MULTIMANIA PRODUCTION,
CONDAMNE Mme Lynda H. épouse L. à rembourses à la société MULTIMANIA PRODUCTION la somme de 20.000,00 frs (vingt mille francs) qui lui a été versée au titre le l’exécution provisoire du jugement infirmé,
LA CONDAMNE également aux entiers dépens qui, pour ceux d’appel pourront être recouvrés directement par Maître BINOCHE, conformément à l’article 699 du NCPC,
DÉBOUTE les parties des leurs autres prétentions contraires ou plus amples.
Et ont signé le présent arrêt :
C. CLAUDE, le greffier
J.-L. GALLET, le président